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Lettre ouverte à mon voile / Opened letter to my hijab

Mon hijab, mon voile, mon long foulard que j’enroule autour de mon visage chaque jour avant de sortir de chez moi. Voilà presque 4 ans que je te porte. 4 ans que tu couvres mes cheveux, mes si jolis cheveux que j’aimais boucler durant mes années de lycée. 4 ans. Ça a l’air peu dit comme ça, maman te porte depuis ses 20 ans soit depuis 22 ans. 4 ans c’est peu certes mais c’est aussi nourri d’histoires, d’expériences, de vécu et de changement de vie. Du tout au tout.

Je me souviens la première fois où j’ai enfin pris la décision de vouloir te porter. C’était à l’aube de mes 18 ans, en pleine terminale et en remise en question aussi. La foi a toujours fait partie intégrante de ma vie mais je commençais à faire mes recherches seules, à vouloir apprendre ma religion par moi-même et à la pratiquer de mon gré.

Je voulais désormais comprendre pourquoi on invoquait Dieu ? Qui était-il pour nous ? Quel était notre devoir envers Lui ? Pourquoi, pourquoi et encore pourquoi. Tant de questions, tant de recherches, et des réponses finalement, une sorte de sens retrouvé à toutes les pratiques que l’on m’avait inculqué depuis toute petite.

Mon papa c’est un héros. Il sauve des âmes, et des vies. Il a toujours su, avec une certaine humilité et une science acquise au cours des années, répondre à mes interrogations. Pourquoi la vie ? Pourquoi doit-on mourir ? Si Dieu nous aime pourquoi nous éprouve-t-il ?

Grâce à ses livres - toujours choisis avec une attention particulière sur les sources - et nos discussions, je trouvais un sens à ce qu’on m’avait appris, je comprenais pourquoi j’appliquais l’islam et ses préceptes je compris que toutes les règles, le mode de vie en général, menait en réalité à une seule et unique chose, le bien-être de l’être humain et de l’humanité.

Je me sentais mieux et en accord avec moi-même, je me rapprochais de la religion j’y trouvais la sérénité, ma paix intérieure et tu es arrivé, la fameuse question à ton sujet, comme le cite le coran Sacré :"Et dis aux croyantes de baisser leurs regards, de garder leur chasteté, et de ne montrer de leurs atours que ce qui en paraît et qu'elles rabattent leur voile sur leurs poitrines; et qu'elles ne montrent leurs atours qu'à leurs maris, ou à leurs pères, ou aux pères de leurs maris, ou à leurs fils, ou aux fils de leurs maris, ou à leurs frères, ou aux fils de leurs frères, ou aux fils de leurs sœurs, ou aux femmes musulmanes, ou aux esclaves qu'elles possèdent, ou aux domestiques mâles impuissants, ou aux garçons impubères qui ignorent tous des parties cachées des femmes. Et qu'elles ne frappent pas avec leurs pieds de façon que l'on sache ce qu'elles cachent de leurs parures. Et repentez-vous tous devant Allah, ò croyants, afin que vous récoltiez le succès". (24/31).

Le voile. Je devais te porter, je devais me couvrir, par soumission à Dieu, j’en avais l’obligation. Et comme à chaque fois, je me posais la même question. Pourquoi ? Pourquoi Dieu a-t-il ordonné aux femmes de se couvrir ? Et comme à chaque fois, je partais en quête de réponses. La pudeur, la partie intégrante de la foi, le symbole de notre croyance, de notre appartenance à notre Créateur. La place de la femme en Islam est tellement sacrée et élevée que c’est à elle que Dieu ordonne de porter ce vêtement, ce signe de foi et de modestie, c’est à la femme qu’est revenu ce privilège, le privilège de se faire reconnaître musulmane, de littéralement porter la religion, aux yeux de toute la société. Il sert de rappel à toutes celles qui le portent et l’enveloppent chaque jour, de protection contre toutes les turpitudes et des personnes hostiles, un symbole de liberté d’expression de pouvoir se dévêtir ou non et pour finir, symbole de féminité, il est la preuve même qu’une femme n’a pas forcément besoin de se dénuder davantage pour exprimer sa singularité.

Je me souviens de la première fois où je suis allée voir mon père pour lui parler de mon envie de te porter. Des larmes d’émotions avaient coulé sur le visage et quand ma mère lui avait demandé pourquoi cette réaction, il avait dit : « j’ai réussi. » En effet il avait bel et bien réussi. Il avait réussi à nous transmettre la religion de la paix, la religion de l’amour il avait fait en sorte que nous l’embrassions tous et non par crainte d’être punis ou rejetés mais parce qu’il s’efforçait de tenir un comportement digne de l’islam auprès de ses enfants et de son épouse, de sorte qu’arrivés à l’adolescence, nous faisions notre cheminement vers la foi de notre propre volonté et non plus par la leur. Il avait fait ce que notre Bien aimé Prophète avait annoncé, que si le musulman s’efforçait de tenir un comportement digne de sa religion et de ce qu’elle enseigne, les gens autour, qui verraient ce comportement bienveillant et tolérant viendraient à l’islam par eux-mêmes. Et c’est ce que Abi avait réussi à faire avec nous.

Je me souviens également de la première fois que je t’ai posé sur ma tête pour sortir, c’était en été 2014, bien que ma volonté de te porter a commencé en février 2014, Abi ne m’a pas laissé te porter avant d’avoir eu mon bac. Et oui contrairement à ce que la plupart des gens peuvent penser quand ils te voient sur ma tête cher Hijab, mon père ou mon « mari » ne m’a jamais obligé à porter quoi que ce soit. Bien au contraire, pour le bien de sa fille et la crainte qu’elle ne soit jugée ou offensée à cause du climat qui règne autour de toi, il m’a vivement conseillé à l’époque d’attendre la fin de mes années lycée et le départ dans une plus grande ville pour pouvoir enfin te porter. Pourtant Dieu sait combien la piété de mon père m’a toujours fascinée, et Dieu sait à quel point il connaît lui aussi l’importance du voile chez la femme, mais là, la peur pour l’avenir de sa fille avait dépassé toute force. Quel comble quand on pense très souvent que c’est la gente masculine qui force ses femmes à se couvrir…

Alors certes, d’autres ont dit, ou me diront, que la manière dont je te porte n’est pas adéquate, que je ne devrais pas porter telle ou telle chose, dès lors que je me voile, que je devrais éviter de faire ci ou ça parce que je porte un symbole de l’Islam et j’en passe. Mon port du voile a été un long et tortueux cheminement, à l’image de celle de ma foi, en toute logique. Devoir allier un vêtement qui couvre un des attraits de ma féminité et vivre dans une société où les critères de la beauté de la femme deviennent de plus en plus exigeants, en n’oubliant pas de devoir aussi dealer avec mes complexes physiques, mon manque de confiance, ma constante comparaison avec les autres, mon surpoids qui m’a suivie durant toute mon adolescence ; oui j’ai eu du mal. Enormément même, il m’a fallu trouver un juste milieu, un point d’alliage entre ma personne, ma foi, et le reste. Aujourd’hui, je suis satisfaite de ce que je porte et c’est tout ce qui compte pour moi, et parfois même quand je me perds, j’ai appris à me recentrer et à toujours essayer de rester cohérente entre ce que je porte sur ma tête et les valeurs qui en découlent, et mon comportement envers moi-même et les autres. Le reste, je n’y tiens plus compte. Ou presque.

Aujourd’hui cher hijab, tu es devenu ma force, mon identité. Tu m’as aidée à devenir celle que je suis, celle que je voulais être. Tu m’as vue grandir et me mettre face aux premières difficultés de la vie d’adulte. Tu as été et tu es mon repère. Le geste que je fais chaque matin pour t’épingler autour de ma tête, face à mon miroir, est comme un rappel chaque jour de qui je suis, celle que je veux devenir, les valeurs que je défends. Alors oui mesdames et messieurs, je suis voilée, je suis musulmane, je suis fière de porter le symbole de la religion de l’Amour, j’ai des rêves que je veux accomplir, je ris, je mange, bois, chante, danse comme vous autres et je m’investis et m’épanouis dans ce que je fais. Je suis femme et indépendante. Je suis musulmane et ambitieuse. J’aspire à des projets qui nourrissent mon esprit et mes actes chaque jour. Je suis libre. J’ai choisi ma liberté, j’ai choisi d’être la seule à décider quelles parties de mon corps je montrais et c’est ma liberté. Je ne suis soumise à aucun code si ce n’est celui du Divin. Je ne me couvre pour personne si ce n’est pour Dieu et pour moi-même. Je veux être distinguée par ce que j’ai dans la tête et non pas par ce que j’y pose dessus. Je ne suis ni objet, ni instrument de commercialisation. C’est mon corps, mon choix, une des plus belles décisions de ma vie et croyez-le ou non je n’ai jamais été aussi heureuse, épanouie et déterminée que depuis que je suis voilée. Je veux prouver à tous, que ce petit bout de tissu qui couvre nos parures, ne couvre ni nos capacités, ni nos rêves. C’est juste une revanche que je veux prendre.

Avec tout mon amour, yours, Habibtissem.

Disclaimer : au cas où il y aurait mauvaise interprétation de mon article, ce n’est ni une ode au voile islamique, ni une lettre de propagande, juste mon témoignage de mon port du voile, ce qu’il m’a apporté et les enjeux de celui-ci afin qu’il puisse aider d’une manière ou d’une autre des jeunes filles ou des jeunes femmes qui l’ont porté ou qui ont le projet de le faire. Je pense que je ne suis certainement pas la seule à avoir vécu cette expérience avec le voile, si d’autres peuvent se retrouver dans ce que j’écris j’y gagne déjà énormément. Et c’était surtout aussi pour répondre à toutes les personnes que j’ai croisées, musulmans ou non et qui m’ont demandé une fois, Ibtissem pourquoi es-tu voilée ? Well, j’espère vous avoir apporté une réponse désormais.

ENG VERSION

My hijab, my headscarf, my long fabric that I put around my face every day before getting out. It’s been almost 4 years since I’ve been wearing you. 4 years that you’ve been covering my hair, my pretty hair that I used to curl when I was in high school. 4 years. It’s not that long if we think about it. Mum has been wearing you since her 20, it has been 22 years. 4 years is short, indeed, but it’s also full of stories, experiences, and a fundamental change in life.

I remember the first time when I finally took the decision to wear you. It was just before I turned 18, during my high school senior year, when I was completely putting questioning myself. Faith has always been part of my life but I started to do my own research, I wanted to learn more about my religion by myself and to practice it on my own.

I wanted to understand why do we invoke God ? Who is He to us? What is our duty to Him ? Why, why and why again. So much questions, so much researches…and finally : answers. It was like all the things that I’ve been taught since I was born made a huge sense, appeared cristal clear. I discovered my religion again.

My dad is a hero. He saves souls and lives. He always managed to answer my deepest questions with a certain sense of modesty and a knowledge that he gained through years of experience. Why do we live ? Why do we have to die ? If God loves us all why does He test us ?

I finally found a meaning about all I learned since I was little, thanks to our discussions and his books that he always carefully chose. I understood why I was practicing Islam and its instructions, I understood that this religion, this way of life was in fact leading to a single and only thing : the well-being of man and mankind.

I was feeling better and in accordance with myself, I was getting closer to religion and findind, my inner peace and serenity within. And you just came, you, as the Holy Quran says : And tell the believing women to reduce [some] of their vision and guard their private parts and not expose their adornment except that which [necessarily] appears thereof and to wrap [a portion of] their headcovers over their chests and not expose their adornment except to their husbands, their fathers, their husbands' fathers, their sons, their husbands' sons, their brothers, their brothers' sons, their sisters' sons, their women, that which their right hands possess, or those male attendants having no physical desire, or children who are not yet aware of the private aspects of women. And let them not stamp their feet to make known what they conceal of their adornment. And turn to Allah in repentance, all of you, O believers, that you might succeed. 24/31

The hijab. I had to wear you. I had to cover myself as a symbol of submission to God. I had to. And, as always, I was wondering, Why ? Why God did order women to cover themselves ? And as always, I was looking for answers. Modesty, the indispensable part of faith, the symbol of our believes, our link with the Creator. The woman’s place in Islam is so blessed and glorified that God orders her to wear this garment, this sign of faith and modesty, He gave her that honor ; the honor to be recognized as a muslim in any society. The woman literally wears the religion. It is a reminder for every woman that wears it, a protection against all the foulness and hostile people, a symbol of freedom of speech, it symbolizes the power you have to decide to cover herself or not and last but not least it proves that a woman doesn’t have to be uncovered to be feminine, to please and to express her singularity.

I remember the first time when I went to my father to talk about my desire to wear you. He started to cry and said : «I did it». Indeed he had done it. He managed to teach us the religion of peace and love, he made sure that we found interest in religion not because we’re scared to be rejected or punished but because his behavior showed us that he was worthy of Islam with his children and his wife in order that, during our teenage years, we would make our own path toward faith, with our own will and not his. He did what our beloved Prophet had announced, that if the muslim strive to keep a behavior worthy of his religion, people would come to it by themselves. And that is what Abi did with us.

I also remember the first time I put you on my head, it was during summer 2014, even though my desire to wear you started that same year, back in February ; my father did not let me wear you before I graduated from high school. So yes, despite what most

people might think when they see you on my head, dear hijab, my father or my « husband » never forced me to wear anything. On the contrary, for the well being of his daughter and by fear that she would be judged or attacked because of the idea about the hijab he strongly advised me, not to wear it until I graduated and left my village for a bigger city. Yet God knows how much the piety of my father has always fascinated me, and God knows how much my dad is aware of the importance of the hijab for the woman. But once again, the fear of his daughter’s future was greater than anything else. It’s ironic when you hear that most people think that men force women to cover themselves.

So yes, some people say, or will say that the way I wear you is inappropriate, that I shouldn’t wear this or that as long as I am covered, that I should avoid doing some things because I am wearing the hijab and so on. Wearing the hijab was not an easy path for me, it was a long process with ups and downs just as my faith logically. Having to combine a cloth that covers one of the attractive traits of my femininity, and live in a society in which beauty standards are more and more demanding, without forgetting that I had to deal with my physical complexes and my constant comparison with others and my weight excess that I had to deal with during my youth. So yes It was difficult. A lot, I had to find a balance between who I am, my faith and the rest. Today I am quite satisfied about what I am wearing and how I wear it and that’s all that matters to me. And even when sometimes I feel that I am loosing myself, I learnt how to keep myself together and I always try to stay in coherence between what Im wearing on my head and the principles that it implies and my behavior between me and myself and others. I don’t care about the rest. Not anymore.

And today, dear hijab, you became my shield, my strenght and my identity. You helped me become the person that I always wanted to be. You saw me grow-up and face the hardships of adulthood. You are, and always have been compass in this life. Pinning you around my face every morning, in front of my reflection is a daily reminder of who I am, and who I want to become, the values that I am defending. So yes, I am covered, I am muslim, and I am proud of wearing the symbol of the religion of love and tolerance. I have dreams that I want to turn into reality, I laugh, eat, drink, sing, dance, just as you and I give a 100 and bloom in what I do. I am woman and I am independent.

I am muslim and ambitious. I aspire to accomplish projects, plans, that nourish my mind and my soul in what I do, every day. I am free. I have chosen my freedom, I chose to be the only one to decide what parts of my body I want to show or not. This is my freedom. I am not submitted to any code but the law of God. I cover myself for anybody but for me and God. I want to be recognize for what I have in my head not what I am putting on it. I am neither an object, or a walking ad. It’s my body, my choice, one of the best decision that I have ever made in my life and, believe it or not, I have never felt happier, blooming and focused than since I started to wear my headscarf. I want to prove everyone that this piece of material that we use to cover our hair doesn't cover neither our capacities or our dreams. But instead a revenge I want to take on everything and everyone that believes the opposite.

Lovely yours, Habibtissem

Disclaimer : Don’t take it the wrong way, this is in no way a hijab propaganda or else, I just wanted to tell you about my experience with the hijab, about what it brought me and the issues of it so it can maybe help other girls or other woman that are wearing or want to wear it. I know that I am certainly not the only one that experienced this with the hijab so if some of you can find themselves - in some way - in what I am writing it’s already a win win game. And mostly I wrote this to finally give an answer to all the people that I have met and who said to me at least one time, « Ibtissem why did you wear the hijab ? » Well I hope that I have brought you a clear answer now.


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